La Liberté

Crainte d’embrasement à Nanterre

Après la mort d’un ado tué par un policier et une nuit de violences, les autorités ont appelé au calme hier

Publié le 29.06.2023

Temps de lecture estimé : 5 minutes

France » Les autorités françaises ont appelé hier au calme après une nuit de violences urbaines en région parisienne, notamment à Nanterre, où Nahel, 17 ans, a été tué par la police après un refus d’obtempérer. Un drame qui suscite une forte émotion à travers le pays, du chef de l’Etat jusqu’à la star du foot Kylian Mbappé.

Députés et membres du gouvernement ont observé en début d’après-midi une minute de silence dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, en hommage à l’adolescent.

«Les images choquantes» diffusées sur les réseaux sociaux «montrent une intervention qui n’est manifestement pas conforme aux règles d’engagement de nos forces de l’ordre», a estimé Elisabeth Borne lors des questions au gouvernement au Sénat.

«Inexcusable»

Dans la matinée, Emmanuel Macron avait évoqué un acte «inexplicable» et «inexcusable». Des propos «inconcevables», a jugé dans la foulée Alliance, l’un des principaux syndicats de police. La cheffe des députés RN Marine Le Pen a de son côté estimé qu’Emmanuel Macron avait eu des propos «très excessifs» et «irresponsables».

De son côté, Gérald Darmanin a annoncé la mobilisation dans la soirée de 2000 policiers et gendarmes à Paris et dans sa petite couronne, 800 de plus que la nuit passée.

«La mobilisation des forces de l’ordre sera renforcée partout dans le département» des Hauts-de-Seine, a également fait savoir le préfet, Laurent Hottiaux, appelant à l’«apaisement» et à un «retour au calme».

Bâtiments dégradés

A Nanterre, où les heurts ont été les plus violents la nuit dernière, «plusieurs bâtiments publics et privés, parmi lesquels des écoles, ont subi d’importantes et inacceptables dégradations parfois irrémédiables», a déploré la mairie, appelant à arrêter «cette spirale destructrice».

Les affrontements, qui ont commencé dès la fin d’après-midi, se sont terminés vers 3 h 30 du matin, et se sont étendus à plusieurs autres communes des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. A Mantes-la-Jolie (Yvelines), la mairie de quartier du Val-Fourré a été incendiée.

Quelques troubles et actes de vandalisme ont également été constatés en province, à Mulhouse, Dijon ou Bordeaux, selon une source policière. Au total, 31 personnes ont été interpellées en France, 24 forces de l’ordre blessées légèrement et une quarantaine de voitures brûlées, selon le Ministère de l’intérieur.

«Mal à ma France»

La mère de l’adolescent a appelé dans une vidéo postée sur TikTok à une marche blanche ce jeudi à 14 h devant la préfecture des Hauts-de-Seine, tout près des lieux du tir mortel, en exprimant sa «révolte pour (son) fils».

Cette affaire a relancé la controverse sur l’action des forces de l’ordre en France, où un nombre record de 13 décès a été enregistré en 2022 après des refus d’obtempérer lors de contrôles routiers. Elle a ému jusqu’au footballeur vedette du PSG et capitaine des Bleus, Kylian Mbappé. «J’ai mal à ma France. Une situation inacceptable», a notamment écrit le joueur sur son compte Twitter.

Une vidéo accablante

Un autre international français, le défenseur du FC Barcelone Jules Koundé, a lui déploré une situation «dramatique». «Qu’une justice digne de ce nom honore la mémoire de cet enfant», a aussi tweeté l’acteur Omar Sy. La défenseure des Droits, Claire Hédon, a annoncé s’être saisie d’office de cette affaire.

Les faits se sont produits mardi matin près de la station de RER Nanterre-Préfecture. Dans un premier temps, des sources policières ont affirmé qu’un véhicule avait foncé sur deux motards de police.

Mais une vidéo circulant sur les réseaux sociaux, authentifiée par l’AFP, a montré qu’un des deux policiers tenait le conducteur en joue, puis qu’il a tiré à bout portant quand la voiture a redémarré. Dans la vidéo, on entend «tu vas te prendre une balle dans la tête», sans que l’on puisse attribuer cette phrase à quelqu’un en particulier. Nahel M. est décédé peu de temps après avoir été atteint au thorax.

Policier interrogé

Le policier soupçonné du tir mortel, âgé de 38 ans, est interrogé par l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) dans le cadre de l’enquête pour homicide volontaire ouverte par le parquet de Nanterre. Sa garde à vue a été prolongée, a-t-on appris mercredi auprès du parquet de Nanterre. «C’est un brigadier de police aguerri, qui avait la confiance de sa hiérarchie», a dit sur CNews le préfet de police, Laurent Nuñez. «Nous prendrons les décisions administratives de suspension si jamais des charges étaient retenues contre lui», a annoncé Gérald Darmanin.

Le drame a également provoqué de nombreuses réactions sur la scène politique. «Assez! Ces meurtres engagent l’autorité de l’Etat! Cette police doit être entièrement refondée, ses meurtriers punis», a tweeté le chef de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon.

Les représentants du RN Jordan Bardella et Sébastien Chenu ont invoqué un «drame», une «tragédie» et demandé à respecter «le temps de l’enquête», ainsi que «la présomption d’innocence».

ats/afp

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