La Liberté

Décès du théologien suisse Hans Küng, opposé au Vatican, à 93 ans

Après avoir été interdit d'enseignement par le Vatican, le théologien catholique HAns Küng a continué à enseigner en tant que professeur invité notamment, non affilié à la faculté de théologie de Tübingen (D). © KEYSTONE/dpa/Franziska Kraufmann
Après avoir été interdit d'enseignement par le Vatican, le théologien catholique HAns Küng a continué à enseigner en tant que professeur invité notamment, non affilié à la faculté de théologie de Tübingen (D). © KEYSTONE/dpa/Franziska Kraufmann
Après avoir été interdit d'enseignement par le Vatican, le théologien catholique HAns Küng a continué à enseigner en tant que professeur invité notamment, non affilié à la faculté de théologie de Tübingen (D). © KEYSTONE/dpa/Franziska Kraufmann
Après avoir été interdit d'enseignement par le Vatican, le théologien catholique HAns Küng a continué à enseigner en tant que professeur invité notamment, non affilié à la faculté de théologie de Tübingen (D). © KEYSTONE/dpa/Franziska Kraufmann


Publié le 06.04.2021


Le théologien suisse Hans Küng s'est éteint mardi à l'âge de 93 ans dans sa maison à Tübingen (D). Contesté pour son attitude critique face au Vatican, ce catholique avait enseigné la théologie en Allemagne depuis les années 1960.

Hans Küng s'est endormi paisiblement, écrit sur Facebook la fondation Weltethos ("Ethique planétaire"), qu'il a co-fondée. Avec lui, "nous perdons le charismatique et impressionnant créateur de la fondation et un maître à penser visionnaire pour un monde plus juste et pacifique", indique-t-elle dans un communiqué.

L'œuvre de sa vie se poursuivra, poursuit la fondation sur Twitter. "C'est notre honneur et notre mission de perpétuer les idées et l'engagement de Hans Küng en faveur de valeurs, de la responsabilité mondiale et du dialogue."

"Le diocèse de Bâle pleure la perte de l'un de ses prêtres les plus éminents", a déclaré l'évêque Felix Gmür à Keystone-ATS. Hans Küng était une personne extrêmement pieuse dans l'âme. Sa vie et son œuvre ont essentiellement été une grande profession de foi, avec les hauts et les bas qui la caractérisent.

Libéral, populaire et têtu

Les prises de position de Hans Küng lui avaient valu une interdiction d'enseignement par le Vatican dès 1979. Elles lui avaient toutefois aussi assuré une grande popularité.

Si le pape Jean Paul II lui a retiré sa "missio canonica" (droit d'enseigner la théologie catholique), il n'a pas réussi à le faire taire. Le Lucernois a même continué à enseigner à Tübingen, sans être affilié à la faculté de théologie, ainsi que dans le monde entier en tant que professeur invité.

"Du pays de Guillaume Tell, j'ai hérité d'une certaine fermeté qui souvent déplaît à la hiérarchie", aimait-il à déclarer. L'éthicien a en outre ouvertement qualifié le pape polonais d'autoritariste opprimant les femmes et les théologiens.

Né à Sursee (LU), fils de cordonnier, Hans Küng a enseigné à Tübingen durant 36 ans à l'Université Eberhard-Karl, avant de prendre sa retraite en 1996. En 1995, il a co-fondé la Fondation pour l'éthique planétaire, active dans l'éducation et la recherche interculturelles et interreligieuses. Depuis 2013, il vivait retiré de la vie publique.

Mondialement reconnu

Huit fois docteur honoris causa, Hans Küng a été traduit dans une vingtaine de langues. Ses plus de 50 livres, dont plusieurs "bestsellers", ont été lus dans des milieux culturels, sociaux et confessionnels les plus divers.

Hans Küng, qui a été un des Suisses les plus connus à l'étranger, s'est engagé dans ses écrits pour une Suisse tolérante et ouverte. Il est également connu pour ses opinions favorables au mariage des prêtres, à l'ordination des femmes, à la contraception et à la théologie de la libération.

Certains de ses ouvrages sont considérés comme de véritables innovations de la théologie du 20e siècle, telle sa trilogie "Etre chrétien", "Dieu existe-t-il ?" et "Vie éternelle ?". Théologien libéral, Hans Küng s'est engagé avec vigueur pour un élargissement de l'horizon de l'Eglise catholique, ce qui a attiré sur lui les foudres de la hiérarchie romaine.

Face à Benoît XVI et à la pédophilie

A la surprise générale, Hans Küng avait été reçu par le pape Benoît XVI en 2005. Lors de cette audience consacrée à sa fondation, les sujets qui fâchent avaient été soigneusement évités. Les deux hommes ont certainement parlé du bon vieux temps: tous deux ont enseigné à Tübingen. Et lorsqu'il pleuvait, Hans Küng avait coutume d'emmener le cycliste Ratzinger dans son Alfa Romeo.

Plus récemment, en 2010, le théologien avait exigé que le pape Benoît XVI fasse son "mea culpa" sur la façon dont les affaires de pédophilie au sein de l'Eglise avaient été gérées depuis des décennies.

Hans Küng n'avait pas épargné non plus l'attitude de l'épiscopat allemand et de son président, l'archevêque Robert Zollitsch, secoué par une série de révélations d'abus sexuels anciens commis par des membres du clergé.

Eloges pour François

Le théologien suisse a, en revanche, tenu des propos élogieux à l'égard de François, le pape actuel. Dans son livre paru en 2015, "Sieben Päpste", il a dit de l'Argentin qu'il a profondément changé l'atmosphère du système de la curie romaine par son langage direct, son style de vie atypique par rapport à la curie et son appel à l'évangile.

Intellectuel reconnu, Hans Küng s'est vu décerner de nombreux prix. L'Union des Eglises évangéliques d'Allemagne lui a décerné le prix Karl Barth 1992. En 1994, il a reçu la croix du mérite fédéral allemand de première classe.

Le Prix culturel de Suisse centrale lui a également été remis en 1991. Et en 1998, Hans Küng a été fait bourgeois d'honneur de sa commune de naissance, Sursee.

ats

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